Coups de cœur

Nous sommes aux prémices de la guerre d'Espagne.  Un vent de révolte souffle dans les rizières où les paysans travaillent durement pour de grands propriétaires terriens.  Une enfant, tendrement aimée, un peu sauvage, assiste à tout cela et aussi aux souffrances de sa mère qui subit le droit de cuissage, sans oser rien dire.  Mais l'histoire est en marche et rien ne pourra l'arrêter. 

Chacune des nouvelles de ce recueil  met en scène un personnage féminin qui s'émancipe d'une façon ou d'une autre.

Une jeune accouchée de jumeaux (un garçon, une fille) est entraînée par sa belle-mère au bord d'un oued où il s'agit de noyer la petite fille de trop, mais elle ne le fera pas..  ; une mère fait tout pour empêcher son fils de rejoindre Daech en Syrie ; une femme quitte son mari pendant sa sieste après lui avoir volé ses chaussures pour qu'il ne puisse pas la rattraper, etc... Cela tient à peu de choses, les moyens sont minimes, mais on imagine le long chemin pour réussir à faire ces choses-là quand toute l'éducation dit le contraire.

A la découverte de Vladivostock, ville mythique de l'extrême-Orient. Sa réalité brutale, sa part de secrets.

Une éducation sentimentale et un magistral portrait de femme libre dans un pays où la liberté de penser et de s'exprimer est fortement réprimée.  L'auteur qui a remporté le prix Fémina n'a pas pu quitter la Turquie pour recueillir son prix. 

Ubasute désigne au Japon cette tradition qui consiste à porter un parent âgé sur une montagne pour le laisser mourir. Cette tradition a été magnifiquement mise en scène dans le film La balade de Narayama, datant de 1983. Isabel Gutierrez s'inspire de cette tradition pour raconter, avec délicatesse et tendresse, ce que fut la vie d'une femme que son fils aîné conduit, pas après pas, au sommet d'une montagne. 

Quel talent! Bravo à ce jeune auteur. Le prix Goncourt couronne une oeuvre à dimension universelle.

Et voici le nouveau Déborah Lévy! Un inventaire de ses biens réels ou imaginaires; et toujours l'importance d' un lieu, d'une maison,  pour se trouver soi-même, en tant que femme et en tant que personne. 

Une histoire d'emprise. Un homme politique use de son pouvoir pour séduire une jeune fille. Du déjà vu. Oui mais ce récit s'intéresse aussi à un troisième personnage, le père de la jeune fille, qui l'a présentée au maire de sa ville, puisqu'il est son chauffeur, en espérant qu'il pourrait l'aider à trouver un logement.  Il a en quelque sorte jeté sa fille dans la gueule du loup.  Comment vit-on après cela? 

Sur le thème de la passion amoureuse, voici Laure et Clément. Ils n'ont pas bu de philtre amoureux mais pourtant, ils prennent littéralement feu et rien ne résiste à la passion qui les embrase.

L'écriture vive et juste retrace à merveille les mouvements du cœur et du corps de l'une et de l'autre, jusqu'à l'épuisement de leurs forces et de leurs existences...puisqu'il n'y a pas d'amour heureux.

Un enfant heureux peut basculer en enfer en quelques instants. Il suffit du crash d'un avion pour que cet enfant, épanoui et chéri, qui prenait des cours de piano avec un très bon professeur, se retrouve dans la case orphelin. Orphelin avec tout ce que cela signifie sur le pouvoir que d'autres adultes que les parents s'imaginent devoir exercer sur l'enfant, sur la nécessité pour lui de se battre, de ruser, de donner coup pour coup. Heureusement, il lui reste la musique. 

A en croire le rush sur le dernier livre de Mona Chollet, de la part des femmes mais aussi des hommes, l'amour a bien besoin d'être réinventé comme à chaque époque,  pour chaque génération, avec, cette fois-ci, l'espoir de relations amoureuses qui sortent les hommes et les femmes des rôles auxquels ils ont été assignés. 

Ce récit est aussi de la poésie, cette quête généalogique est aussi une recherche sur soi, le genre est difficile à définir mais ce qui est sûr c'est que l'écriture est d'une limpidité et d'une élégance rares. Les expressions sont justes, chaque mot est à sa place, de la retenue et de l'analyse, c'est de là que vient la beauté du texte.